L’Anses évalue l’efficacité et l’innocuité des alternatives aux antibiotiques en élevage et pose la question d’un statut spécifique pour ces produits
L’Agence publie ce jour son état des lieux des alternatives aux antibiotiques en vue de diminuer leur usage en élevage fondé sur une méthode originale d’évaluation des publications scientifiques, hétérogènes dans ce domaine. Dans son rapport, l’Agence recense l’existence d’un grand nombre de produits et substances (molécules, plantes, extraits de plantes et microorganismes) utilisés comme alternatives aux antibiotiques, mais souligne l’hétérogénéité des données disponibles pour en évaluer l’innocuité et l’efficacité, ainsi que leur capacité à sélectionner des bactéries résistantes. L’Anses souligne la nécessité d’engager une réflexion pour définir, pour les principales filières animales concernées, les classes d’alternatives qui devraient faire en priorité l’objet de travaux approfondis pour lever les incertitudes sur leur efficacité et leur innocuité. L’Anses recommande également de porter la question du statut juridique de ces produits au niveau européen dans le cadre du plan de lutte contre la résistance aux antibiotiques, afin que soient étudiées la pertinence et la faisabilité de créer un statut spécifique pour les produits induisant la réduction de l’usage des antibiotiques, sans les considérer comme des médicaments vétérinaires.
Le Plan « Ecoantibio 1 », publié en 2012 avec un plan d’action sur cinq ans, prévoyait de « développer les alternatives permettant d’éviter les recours aux antibiotiques » et d’évaluer le bénéfice de traitements alternatifs permettant d’en limiter le recours. En 2014, l’Anses a publié un rapport sur l’antibiorésistance et l’évaluation des pratiques à risque en matière d’utilisation des antibiotiques en médecine vétérinaire. Cette expertise avait abordé la question des alternatives aux antibiotiques, mais n’était pas entrée dans le détail des produits concernés.
En outre, l’Anses a rendu en 2013 un avis relatif à l’utilisation de l’oxyde de zinc dans l’alimentation des porcelets au sevrage pour diminuer le recours aux antibiotiques. Il s’agissait de la première évaluation d’alternative au sens du plan Ecoantibio, dans laquelle un chapitre avait été consacré aux « alternatives » indiquant, à partir des publications récentes, les familles de produits sur lesquelles portaient alors les recherches. A la suite de ce premier avis, il a été demandé à l’Agence, d’une part de réaliser un état des lieux des produits et substances actuellement utilisés comme alternatives aux antibiotiques en vue de diminuer leur usage, et d’autre part d’évaluer l’efficacité et l’innocuité de ces substances pour l’Homme (consommateur et manipulateur), l’animal et l’environnement, après un examen de la bibliographie existante.
Conclusions et recommandations de l’Agence
Dans le rapport qu’elle publie ce jour, l’Anses présente les résultats d’un travail de recensement visant toutes les substances et préparations commerciales qui revendiquent, directement ou indirectement, d’être une solution pour limiter l’usage des antibiotiques chez les animaux dans différentes filières animales (ruminants, volailles, porcs, lapins et poissons).
Les préparations commerciales les plus fréquemment citées contiennent majoritairement des plantes, des huiles essentielles, des probiotiques, des acides organiques et/ou gras. L’évaluation de l’efficacité et de l’innocuité de ces produits a été réalisée sur la base de la bibliographie scientifique disponible. Pour ce faire, l’Agence a élaboré une méthode d’évaluation des publications scientifiques relatives à la mesure de l’efficacité de substances permettant de diminuer le recours aux antibiotiques.
L’Agence note l’existence d’un grand nombre de produits et substances (molécules, plantes, extraits de plantes et microorganismes) utilisés comme alternatives aux antibiotiques. Elle souligne l’hétérogénéité et la variabilité de la base bibliographique disponible, ce qui constitue une limite pour évaluer l’innocuité et l’efficacité d’un grand nombre de ces alternatives, comme la capacité de ces alternatives à sélectionner des bactéries résistantes. Toutefois, la méthode élaborée dans l’Avis peut être utilisée ultérieurement par les interprofessions pour évaluer de nouvelles données scientifiques à venir, ou issues de recherches non publiées.
L’Anses souligne la nécessité d’engager une réflexion pour définir, pour les principales filières animales concernées, les classes d’alternatives qui devraient faire en priorité l’objet de travaux approfondis pour lever les incertitudes sur leur efficacité et leur innocuité, au moyen de méthodes appropriées.
Les données aujourd’hui disponibles conduisent à considérer que les différentes familles de produits semblent être caractérisées par un effet de plus faible ampleur que celle des antibiotiques. Cette situation constitue un défi important pour la recherche expérimentale qui doit adapter ses protocoles à la mise en évidence d’ « effets de faible intensité ». L’Agence souligne l’importance de ces besoins de recherche méthodologique, pour asseoir les démonstrations sur des bases scientifiques solides.
L’Agence appelle par ailleurs l’attention sur l’importance de déterminer, en amont des études et expérimentations, le statut juridique de ces produits, dans la mesure où ce statut permettra de définir les études nécessaires ainsi que les conditions de leur réalisation, préalablement à la mise sur le marché du produit et à son utilisation. L’Anses recommande de porter la question du statut juridique de ces produits au niveau européen, dans le cadre du plan de lutte contre la résistance aux antibiotiques, afin que soient étudiées la pertinence et la faisabilité de créer un statut spécifique pour les produits induisant la réduction de l’usage des antibiotiques sans les considérer comme des médicaments vétérinaires.