Produits Phytopharmaceutiques

L'Anses et l’autorisation des produits phytopharmaceutiques en 20 questions

L’Anses est en charge d’examiner les demandes d’autorisation des produits phytopharmaceutiques. En quoi consiste exactement cette mission ? Comment cela s’inscrit-il dans le cadre français et européen ? 20 questions pour tout comprendre.

Un produit phytopharmaceutique est un produit composé d’une ou plusieurs substances actives et de co-formulants. Ces produits sont destinés notamment à protéger les végétaux contre des organismes nuisibles, assurer leur conservation ou encore détruire les végétaux indésirables. Ils sont encadrés par le règlement européen (CE) n° 1107/2009.

Dans le langage courant, ils sont souvent désignés sous le nom de pesticides, un terme qui regroupe en réalité différents types de produits utilisés pour des usages très variés.

Une substance active peut être un composé chimique de synthèse, un extrait de plante, une phéromone ou un micro-organisme ayant une action contre un ravageur ou sur une plante ou partie de plante jugée indésirable. Une substance active a une propriété spécifique :  fongicide, insecticide, herbicide, régulatrice de croissance, nématicide, etc.

Les co-formulants ajoutés à la substance active servent à donner au produit des caractéristiques appropriées à son application. Il s'agit par exemple d'anti-mousse, de diluant ou d'agent mouillant.

Pour être utilisé sur le territoire national, un produit phytopharmaceutique doit disposer d’une autorisation de mise sur le marché (AMM), qui est valable pour des usages donnés. Un usage combine trois éléments : la culture + la fonction ou le mode d’application + la cible de la lutte, par exemple « vigne + traitement des parties aériennes + mildiou ».

L’AMM précise les caractéristiques du produit et les conditions d’emploi en fonction des usages : végétal concerné, bioagresseur ciblé, quantité et fréquence d’application, etc. Elle précise aussi les mesures de protection à appliquer pour l’humain (applicateurs du produit ou travailleurs des cultures) dont le port d’équipements de protection individuelle (comme des combinaisons, masques, gants), et l’environnement en fonction de risques spécifiques pour l’eau et les écosystèmes.

L’Anses évalue l’efficacité et les risques que l’utilisation des produits représentent pour la santé humaine et les écosystèmes et elle statue sur des demandes d’AMM. Ainsi, elle délivre, refuse et retire les autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques pour la France. C’est le directeur général de l’Anses qui signe les décisions.

Toutes les décisions sont publiées et accessibles sur le site internet de l'Anses, de même que les conclusions de l'évaluation sur lesquelles les décisions se fondent.

L’Anses est aussi force de proposition pour faire évoluer les méthodologies d’évaluation des substances actives au niveau européen.

La loi n°2014-1170 du 13 octobre 2014, dite loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, a désigné l’Anses comme l’autorité compétente nationale pour la délivrance des AMM.

Jusqu’à fin 2014, l’Agence réalisait uniquement l’évaluation de l’efficacité et des risques sanitaires et environnementaux liés à l’utilisation de chaque produit. Elle transmettait ses conclusions à la Direction générale de l’alimentation, au sein du ministère en charge de l’Agriculture, qui prenait ensuite la décision de délivrer l’AMM ou non.

La législation européenne fixe les critères uniformes d’évaluation et de décision selon le règlement (UE) N° 546/2011. Ces critères sont complétés par quelques textes français, sur la protection des abeilles par exemple.

Les études que l’Anses examine doivent concerner le produit tel qu’il serait commercialisé : même composition, mêmes doses d’application. Il s’agit d’évaluer son efficacité et les risques liés à son utilisation pour les humains - applicateurs, travailleurs des cultures, personnes présentes lors du traitement et résidents, consommateurs - l’environnement, la faune et la flore. 
Pour en savoir plus sur l’évaluation des risques des produits phytopharmaceutiques avant leur mise sur le marché.

Pour en savoir plus sur l’évaluation des risques des produits phytopharmaceutiques avant leur mise sur le marché.

La notion de produit de biocontrôle n’est pas définie au niveau européen. Spécifique à la France (définition du biocontrôle mentionnée à l'article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime), elle englobe les macro-organismes (coccinelles par exemple) et des produits phytopharmaceutiques contenant des micro-organismes, des médiateurs chimiques (phéromones, kairomones) et des substances naturelles d’origine végétale, animale ou minérale (ex. soufre, phosphate ferrique, huile de paraffine, laminarine, huile essentielle d’orange, acide pélargonique….).

Pour faciliter la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques de biocontrôle, l’Anses classe leurs demandes d’AMM comme prioritaires dans le flux des dossiers. Toutefois, les produits de biocontrôle doivent répondre aux exigences de sécurité et montrer une efficacité. De même, la durée pour examiner chaque dossier dépend des critères légaux qui s’appliquent.

En savoir plus sur les solutions de biocontrôle.

Les impacts socio-économiques de la délivrance ou du refus d’une d’AMM ne font pas partie des critères légaux d’évaluation et de décision harmonisés en Europe.

L’évaluation scientifique a pour seul objectif de vérifier l’efficacité et la sécurité du produit pour la santé humaine et les écosystèmes, selon des règles harmonisées au niveau européen. Si l’évaluation conclut à un risque pour les humains ou pour l’environnement, la réglementation ne permet pas de délivrer ou de renouveler une AMM, même si l’absence de ce produit sur le marché a un impact socio-économique très important.

Dans certains cas uniquement : c’est obligatoire quand la substance active est « candidate à la substitution » du fait de son profil toxicologique défavorable ou parce qu’elle est particulièrement persistante (article 50.1 du règlement (CE) n° 1107/2009). L’Anses doit comparer chaque usage du produit la contenant à des solutions de traitements qui existent déjà afin de favoriser, chaque fois que cela est possible, l’approche la plus sûre à performance similaire, pour un usage donné. En pratique, l’Anses inventorie les autres produits sur le marché pour le même usage et s’il y en a suffisamment, avec des modes d’action variés et présentant moins de risques, alors on n’autorise pas le nouvel usage.

Il existe dans le règlement une autre possibilité de substitution mobilisable, quel que soit le statut de la substance active cette fois, dès lors que des alternatives « non chimiques d’usage courant en France » existent. Elle n’est utilisable que de façon exceptionnelle (article 50.2 du règlement (CE) n° 1107/2009). Elle a été mobilisée en France pour le glyphosate.

L’Anses s’est organisée pour mener les activités d’évaluation scientifique indépendamment de l’instruction des dossiers pour délivrer ou non les autorisations. Concrètement, ces activités reposent sur deux directions différentes.

Comme pour toutes les évaluations de risques qu’elle réalise, l’Anses s’appuie sur des comités d'experts spécialisés. Ils sont soumis au cadre déontologique strict mis en place par l’Agence. Les conclusions des évaluations sont rendues publiques avec les décisions.

Les produits sont évalués sur la base des éléments scientifiques fournis par les industriels dans leur demande d’AMM, qui intègre des études ad hoc et des éléments de la littérature scientifique. En effet, tout industriel qui demande une AMM est tenu de démontrer préalablement, dans un dossier complet, que le produit est conforme aux critères uniformes de décision de l’Union européenne. L’Agence vérifie systématiquement la validité scientifique des données des industriels et leur conformité aux exigences règlementaires.

Par ailleurs, l’Agence tient aussi compte des données issues de la littérature scientifique, du dispositif de phytopharmacovigilance et de ses travaux d’expertise en évaluation des risques, quand elles existent.

Non, les substances actives sont approuvées à l’échelle de l’Union européenne par les autorités compétentes des États membres. En France, le ministère chargé de l’Agriculture est l’autorité compétente pour l’approbation des substances actives.

L’Anses intervient toutefois dans l’évaluation scientifique européenne des substances actives coordonnée par l’EFSA, autorité européenne de sécurité des aliments, sur la base des études ad hoc et de la bibliographie scientifique fournies par les industriels.

La Commission européenne s’appuie sur les conclusions produites par l’EFSA pour proposer ensuite aux États membres un règlement d’approbation, si la substance active remplit les conditions requises ou de règlement de non approbation. Le règlement d’approbation, d’une durée définie, ou de non approbation concernant la substance active est voté par les représentants des États membres dans le cadre d’un Comité permanent spécifique, dédié à la chaîne alimentaire et la santé animale.

Ce n’est qu’une fois approuvée au niveau européen qu’une substance active peut entrer dans la composition d’un produit phytopharmaceutique, ce qui requiert une demande complémentaire des industriels concernés en vue de l’obtention d’une AMM nationale par produit incorporant cette substance active approuvée.

Pour tout savoir sur l’évaluation des substances actives phytopharmaceutiques.

Ce comité intervient sur les produits phytopharmaceutiques mais aussi sur les produits biocides et les matières fertilisantes et supports de culture tels que les engrais. Il comprend des personnalités qualifiées, dont certaines issues des filières de production agricoles, des professionnels de santé, des agronomes, des spécialistes de l’environnement.

Son rôle : conseiller le directeur général de l’Anses, à sa demande, sur les conditions d’emploi des produits, l’applicabilité de certaines mesures de gestion des risques, l’intérêt sanitaire, environnemental, agronomique et socio-économique de certains produits ou approches, ou encore l’identification de sujets d'études à prioriser.

Il n’intervient donc pas dans l’évaluation des produits ni dans la décision d’autoriser ou refuser la mise sur le marché d’un produit en particulier.

En savoir plus sur le comité de suivi des AMM de l’Anses.

Les risques d’effets nocifs sur l’être humain, les animaux et l’environnement ne dépendent pas que de la substance active : ils varient selon la composition du produit, sa présentation (liquide, poudre…), les pratiques agricoles revendiquées (doses, type d’application, etc.) et les situations agropédoclimatiques.

De plus, une substance active est approuvée au niveau européen en tenant compte d’un usage « représentatif » d’un produit la contenant. Tous les autres usages et produits doivent donc être évalués lors des demandes d’AMM des produits.

L’examen de chaque produit est nécessaire pour disposer de produits sûrs, dont les usages ont été évalués et les conditions d'emploi précisées. Les AMM des produits permettent de tenir compte de la diversité et des spécificités éventuelles des pratiques culturales, ou encore du progrès des connaissances concernant les risques associés à ces produits. Même si la substance active est approuvée au niveau européen, il arrive donc régulièrement que des autorisations de mise sur le marché soient refusées pour un produit pour certains de ses usages.

Plusieurs situations sont possibles :

  • Des éléments nouveaux mettent en évidence des risques inacceptables pour la santé ou l’environnement : il faut réviser l’AMM pour modifier les conditions d’emploi, et si ce n’est pas possible, il faut retirer l’AMM dans les meilleurs délais, indépendamment du calendrier de réexamen de la substance active, comme l’indique la législation (article 44 du règlement (CE) N°1107/2009).
  • La substance active contenue dans le produit n’est plus approuvée : tous les produits la contenant doivent alors être retirés du marché.
  • La substance active vient d’être réévaluée et réapprouvée : les industriels doivent soumettre sous trois mois des dossiers s’ils veulent renouveler les AMM pour les produits la contenant. Les AMM sans dossier de renouvellement ne sont pas maintenues. Pour les autres, les anciennes AMM sont prolongées le temps de l’évaluation. Suite à l’évaluation du dossier, si les risques d’effets nocifs ont été jugés inacceptables, l’AMM est retirée. 
  • Le détenteur de l’AMM demande son retrait, pour des raisons commerciales par exemple.

Il existe plusieurs raisons :

  • Un État membre peut adopter des mesures règlementaires en plus du cadre européen, aller plus loin que la législation européenne et interdire l’utilisation de certains produits sur son territoire. On parle alors de « surtransposition ». La France, qui a adopté des mesures générales de protection des abeilles, a également interdit, par une loi de 2018, l’usage des produits composés de substances actives du groupe des néonicotinoïdes. Du fait de cette loi, l’Anses a donc dû introduire une restriction dans les AMM de ces produits ; 
  • Les demandes d’AMM ne sont pas nécessairement déposées par les fabricants dans tous les États, ni instruites dans le même calendrier d’un pays à l’autre. Les industriels ne demandent pas non plus forcément une AMM pour les mêmes usages d’un pays à l’autre. Le statut d’autorisation peut aussi jouer, comme par exemple le fait que le produit soit disponible sous dérogation dans un autre Etat membre ;
  • L’évaluation scientifique du devenir dans l’environnement des produits tient compte des différentes situations agropédoclimatiques propres à chaque pays. Elle peut donc être différente selon les pays ;
  • L’évaluation d’une demande d’AMM se base sur les méthodes et les critères en vigueur au moment du dépôt des dossiers. La science évolue et l’évaluation des produits est de plus en plus poussée, dans le but unique de préserver la santé des humains et de l’environnement. Un produit évalué et autorisé dans un autre pays il y a plusieurs années, peut voir son autorisation refusée lorsqu’il est évalué avec les méthodes et critères actuels.

Non, il ne suffit pas qu’un produit phytopharmaceutique soit autorisé dans un État membre européen pour qu’il le soit en France, et inversement, conformément à la législation. Tout État peut refuser l’autorisation d’un produit sur son territoire si, en raison de ses caractéristiques, le produit y présente un risque pour la santé humaine, animale ou l’environnement.

Quand l’Anses reçoit une demande de reconnaissance mutuelle de la part d’un industriel, elle s’assure d’abord qu’elle est compatible avec le droit national et avec les spécificités agricoles et climatiques locales. Conformément au droit européen, elle s’appuie sur les documents guides européens pour faire cette vérification.

Sur la période janvier 2018-décembre 2024, sur les 108 dossiers de reconnaissance mutuelle traités par l’Anses, 55 AMM ont été accordées, soit 51 % des demandes.

En cas de situation d’urgence pour protéger certaines cultures ou végétaux, le règlement européen rend possible l’utilisation de produits phytopharmaceutiques pourtant non autorisés pour ces usages, par une dérogation d’une durée limitée à 120 jours (article 53 du règlement (CE) n°1107/2009).

Cette dérogation, qui est accordée en France par le ministère chargé de l’Agriculture, rend possible la lutte immédiatement contre le bioagresseur en l’absence de toute autre solution.

Pour la quasi-totalité des cultures, l’évaluation s’effectue par zone. Trois zones ont été définies en Europe selon leurs conditions agricoles, pédologiques et climatiques : la zone nord, la zone centre et la zone sud. La France fait partie de la zone sud.

Avec ce zonage, l’Union européenne concilie la nécessité de tenir compte de contextes agricoles très différents d’une extrémité à l’autre de l’Europe et l’importance d’harmoniser autant que possible les évaluations de produits et de mutualiser les efforts d’évaluation.

Dans une zone, les évaluations sont mutualisées : un État membre est désigné pour évaluer le produit, les autres États pouvant ensuite commenter cette évaluation et l’utiliser pour les demandes d’AMM déposées chez eux. Certaines évaluations produites par l’Anses servent donc de point de départ pour traiter les demandes d’AMM identiques déposées dans d’autres États de la zone sud, et réciproquement.

Une fois les produits appliqués sur les cultures, ceux-ci ou leurs résidus peuvent induire des effets sur la santé et l’environnement. L’Anses anime un dispositif national de phytopharmacovigilance pour surveiller les effets indésirables attribuables à ces produits et agir en conséquence.

En savoir plus sur la phytopharmacovigilance.

La santé des plantes fait aussi partie des missions sanitaires de l’Anses. Le laboratoire de la santé des végétaux de l’Anses mène des recherches sur les organismes nuisibles, sur la résistance aux traitements phytopharmaceutiques et sur les autres moyens de lutte. L’Anses coanime également la plateforme nationale d’épidémiosurveillance en santé végétale pour, notamment, surveiller l’émergence de nouveaux dangers.

En savoir plus sur les activités de notre laboratoire de la santé des végétaux.

Pour documenter certains risques émergents ou mal connus liés aux produits phytopharmaceutiques, l’Anses réalise des expertises en évaluation des risques. Pour ce faire elle s’appuie sur le ou les collectif(s) d’experts les plus adaptés – CES santé des végétaux, biotechnologies, produits phytopharmaceutiques.

En savoir plus sur les activités d’évaluation des risques de l’Anses.

Pour échanger avec les parties prenantes sur l’état des connaissances, sur les méthodologies d’évaluation des risques sanitaires et sur les débats scientifiques du moment, l’Anses anime une plateforme permanente de dialogue autour de ses activités liées aux produits phytopharmaceutiques.

En savoir plus sur la plateforme de dialogue autour des autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.

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