La peste porcine africaine en 14 questions
La peste porcine africaine (PPA) est une maladie virale hémorragique qui touche les porcs domestiques et les sangliers et n’est pas contagieuse pour l’Homme. Présente aujourd’hui dans certains pays d'Europe et d’Asie, elle représente une menace pour les filières professionnelles concernées. L’Anses mène des travaux pour mieux détecter le virus et fournit un appui technique et scientifique aux autorités pour la mise en place de mesures de gestion efficaces afin d’éviter l’introduction et la propagation de la maladie en France.
Qu’est-ce que la peste porcine africaine ?
La Peste Porcine Africaine (PPA), aussi appelée Fièvre Porcine Africaine, est une maladie virale à l’origine d’un syndrome hémorragique souvent fatal dans ses formes aiguës chez les suidés domestiques et sauvages uniquement. Contagieuse chez les suidés européens, elle est inapparente chez les suidés sauvages africains (potamochères et phacochères) et non transmissible à l'Homme. L’agent pathogène responsable de la peste porcine africaine est un virus à ADN de la famille des Asfarviridés. Cette maladie entraîne des pertes économiques majeures en raison de son taux de mortalité élevé et des restrictions commerciales imposées aux pays touchés. La PPA est classée danger sanitaire de 1ère catégorie en France.
Quelle est son histoire ?
Cette maladie existe depuis au moins un siècle chez les suidés sauvages d’Afrique subsaharienne (potamochères, phacochères et autres hylochères) qui ne développent pourtant aucun symptôme. Décrite pour la première fois au Kenya en 1921, la PPA s’est propagée en Afrique d’individu à individu ainsi que par les morsures de tiques molles et est devenue endémique en région subsaharienne.
Ses premières incursions en dehors de l’Afrique datent des années 60, en lien avec le développement du commerce international. Les foyers américains ont été assez rapidement éradiqués comme les européens, sauf pour la péninsule ibérique où il a fallu attendre 1995 et pour la Sardaigne où la PPA est devenue enzootique depuis son introduction en 1978.
En 2007, le continent européen est de nouveau touché, avec une première détection de foyers en élevage porcin en Géorgie. Un déchargement de morceaux de viande de porcs contaminés d’un bateau serait à l’origine de l’introduction du virus sur le continent.
Tous les modes de diffusion de la PPA sont possibles, et les récents évènements survenus dans la faune sauvage en Belgique, à plusieurs milliers de kilomètres des autres pays européens infectés, d’une part, et en Allemagne, à quelques kilomètres de la frontière polonaise et d’une zone infectée par la PPA d’autre part, illustrent cette diversité de modes de propagation.
L'Homme peut-il être contaminé ?
Non, la peste porcine africaine n’est pas transmissible à l’Homme.
Quels sont les animaux concernés ?
En Europe, la peste porcine africaine touche exclusivement :
- les porcs domestiques ;
- les sangliers.
Pourquoi les suidés sauvages africains ne sont pas sensibles à cette maladie ?
En Afrique, dans le cadre du cycle sylvatique, le virus circule entre les tiques molles présentes dans les terriers et les jeunes phacochères qui développent une virémie mais y survivent. Le virus n’est plus détecté chez les adultes. Il est probable que le système immunitaire des phacochères a appris de longue date à maitriser l’infection dans le cadre d’une adaptation virus/hôte mais les déterminants de ces mécanismes restent inconnus à ce jour.
Quelles sont les sources de contamination ?
Un animal sain peut être contaminé :
- par contact avec un animal infecté introduit sur notre territoire ou avec un cadavre d’animal infecté (le virus y survit plusieurs mois) ;
- par consommation d’aliments contaminés par le virus comme la viande et/ou les produits à base de viande de porcs ou de sangliers tels que les produits de fumaison et salaison dans lesquels le virus peut survivre plus de deux mois.
La persistance du virus dans la viande est en général à l’origine de plusieurs foyers de PPA, plus ou moins éloignés, par distribution aux animaux de déchets de cuisine et de table non traités (eaux grasses, déchets, denrées alimentaires, plasmas insuffisamment traités thermiquement). A noter que cette pratique est interdite en Europe pour les animaux d’élevage. Cependant, il n’est pas exclu que des sangliers sauvages soient en contact avec de tels déchets et puissent être ainsi contaminés.
- par piqûre de tiques du genre Ornithodoros : ces tiques molles ingèrent le virus en se nourrissant du sang d’animaux contaminés, puis le transmettent en piquant d’autres animaux sensibles. A noter que ces tiques molles n’ont pas été identifiées en France et que l’avis de l’Anses sur le rôle des arthropodes dans la propagation de la PPA indique la probabilité d’introduction et d’extension de tiques molles du genre Ornithodoros sensu stricto en France métropolitaine est considérée comme quasi-nulle (1 sur une échelle de 0 à 9) ;
- par contact avec des véhicules, des personnes, ou des matériels contaminés. Etant donné la très grande résistance du virus dans le milieu extérieur, tout matériel souillé (vêtements, bottes, aiguilles,...) peut favoriser la transmission indirecte du virus.
Quels sont les symptômes et comment diagnostiquer la PPA ?
Il existe 3 niveaux de virulence de la maladie :
- la forme aiguë ;
- la forme subaiguë ;
- la forme chronique.
Les symptômes et lésions sont similaires à ceux décrits pour la peste porcine classique (maladie "rouge") :
- hyperthermie ;
- désordres hématologiques ;
- rougeurs cutanées ;
- anorexie ;
- léthargie ;
- troubles de la coordination ;
- vomissements ;
- diarrhée.
La mort survient en 4 à 13 jours avec un taux de 100 % lors de la forme aiguë, en 30 à 40 jours avec une mortalité moindre lors de la forme subaiguë. La maladie peut évoluer pendant plusieurs mois lors de la forme chronique.
Seules les analyses de laboratoire (virologiques et/ou sérologiques) permettent de poser un diagnostic de certitude et de différencier la PPA de la peste porcine classique.
Existe-il un traitement/vaccin ?
A ce jour, il n'existe ni traitement, ni vaccin commercialisé permettant de lutter contre cette maladie. Le virus responsable de la PPA, seul membre de sa famille virale des Asfarviridae, est un virus à ADN très complexe et de très grande taille. Il infecte les cellules de la lignée monocytes-macrophages, et détourne la réponse immunitaire à son profit. Son génome n’a pu être séquencé en entier que ces dernières années et les gènes impliqués dans la virulence ou la protection ne sont pas encore tous identifiés, ce qui complique la mise au point de vaccin fiable et efficace. Le Laboratoire de Ploufragan-Plouzané-Niort a développé un candidat vaccin qui a fait l’objet d’une demande de brevet. Ce vaccin a donné de bons résultats d’innocuité et d’efficacité, des études sont en cours pour permettre son éventuelle production à l’échelle industrielle.
Que faire si je suspecte un cas de PPA ?
Si vous suspectez un cas de PPA, contactez sans tarder votre vétérinaire.
Quels sont les pays touchés ?
Depuis 2014, la PPA s’est invitée dans l’Union européenne, en premier en Pologne et dans les pays Baltes (Estonie, Lituanie, Lettonie) où elle devenue enzootique chez les sangliers sauvages. L’infection a atteint de nouveaux pays, Moldavie (2016), Roumanie (2017), République Tchèque (2017) et plus récemment la Hongrie (avril 2018), la Belgique (septembre 2018), l'Allemagne (septembre 2020) et l'Italie continentale (janvier 2022).
Le continent asiatique est aussi touché, la Chine en août 2018, la Mongolie en janvier 2019, Taiwan et le Vietnam en février 2019, tout comme le continent américain : République dominicaine (2021) dans les Caraïbes. Le risque de diffusion est devenu mondial.
Pour en savoir plus, consultez la Plateforme Epidémiosurveillance Santé Animale et notamment la carte intéractive dédiée à la PPA.
Quelles sont les conséquences de la PPA ?
La PPA entraîne des pertes économiques majeures en filière de production porcine, en raison de son taux de mortalité élevé et des restrictions commerciales imposées aux pays touchés. A titre d’exemple, la Chine, premier producteur mondial de porcs, a perdu plus de 6,7 millions de porcs depuis le début de l’épizootie sur son territoire en août 2018.
En France, la PPA est classée danger sanitaire de 1ère catégorie.
Quelles sont les mesures pour prévenir la PPA en France ?
En septembre 2018, le ministère de l’Agriculture a mis en place un plan d’actions intitulé : "Organisation de la prévention, de la surveillance et de la lutte contre la peste porcine africaine".
Pour prévenir le risque d’introduction du virus en France, des mesures de sensibilisation (affiches, spots radio …) ont notamment été mises en place. Elles sont destinées au grand public comme à des acteurs plus ciblés : éleveurs, transporteurs, vétérinaires, techniciens, chasseurs, travailleurs originaires des pays touchés.
Pour surveiller la propagation du virus, il est par exemple demandé :
- pour la faune domestique : de notifier tout signe clinique, lésions, ou surmortalité pour lesquels la présence des pestes porcines ne peut être exclue ;
- pour la faune sauvage : de signaler toute mortalité de sanglier auprès du réseau SAGIR.
Enfin, pour lutter contre la PPA, des zones (intitulées « zone blanche de dépeuplement »), situées près des zones réglementées ou sévissent les cas de PPA en Belgique, ont été clôturées et dépeuplées par les chasseurs, l’Office Français de la Biodiversité et l'Office Nationale des forêts.
Que dois-je faire si je suis éleveur/chasseur/simple citoyen ?
Vous êtes un éleveur :
- avant d’acheter de l’alimentation, de la litière ou des porcs, assurez-vous qu’ils proviennent de fermes fiables qui ont pris les mesures nécessaires pour protéger leur exploitation du virus ;
- ne laissez pas vos cochons être en contact avec des sangliers ou des porcs d’autres fermes ;
- ne donnez jamais de déchets de cuisine aux porcs ;
- évitez l’élevage en plein air dans les zones affectées par la PPA.
Vous êtes un chasseur :
Pendant la chasse :
- ne laissez pas de viscères de sangliers dans les forêts ;
- ne laissez pas de nourriture ou de déchets dans les zones où les sangliers peuvent être présents.
Après la chasse :
- ne soyez pas en contact avec des porcs domestiques ;
- lavez-vous les mains avec de l'eau et du savon ;
- nettoyez et désinfectez vos bottes, le matériel et les véhicules utilisés (y compris les roues et l'intérieur du véhicule).
Si vous êtes allés chasser dans un pays infecté, il vous est demandé d'éviter de :
- ramener des trophées de chasse en France ;
- importer des sangliers des pays infectés.
Vous êtes un citoyen ou chauffeur routier :
- évitez de ramener en France de la viande ou de la charcuterie de pays infectés ;
- sur les aires d’autoroute, lors des promenades en forêt, … veillez à jeter vos déchets alimentaires dans les poubelles.
Dans tous les cas :
Si vous trouvez un sanglier mort, même si la zone n’a pas été touchée par la PPA, contactez sans attendre les autorités vétérinaires officielles via le réseau SAGIR.
Quel est le rôle de l'Anses ?
À travers son laboratoire de Ploufragan-Plouzané-Niort, Laboratoire national de référence pour la PPA depuis 2001 et son laboratoire de la rage et de la faune sauvage basé à Nancy, l’Anses réalise des travaux de recherche pour :
- surveiller la propagation de la maladie dans les pays voisins ;
- diagnostiquer la PPA grâce à des outils de détection virologique et sérologique fiables ;
- analyser les mécanismes de pathogénie du virus chez le porc pour trouver un vaccin ;
- étudier le rôle de vecteur et de réservoir des tiques molles européennes ;
- étudier la propagation potentielle du virus intra et inter-espèces grâce à la modélisation d’une part, et à la connaissance des systèmes d’élevages de porcs et du comportement des sangliers sauvages et de la dynamique de leurs populations d’autre part.
Après la détection d’un foyer de PPA en Belgique, à quelques kilomètres de la frontière française, l’Anses a constitué en urgence un groupe d’expertise collective, rassemblant des experts virologistes, épidémiologistes et biologistes, dont certains sont issus des laboratoires précités.
À ce jour, le groupe d’expertise a rendu une quinzaine d’avis scientifiques relatifs aux risques d’introduction de la PPA en France et aux mesures de sécurité à mettre en place en France pour prévenir le risque de diffusion de la maladie sur notre territoire (PDF), de dissémination du virus de la PPA par différents supports, en élevage ou dans l’environnement (PDF), ou encore au rôle potentiel des arthropodes dans la transmission du virus (PDF).